mardi, mai 23, 2006

Sans faire bouger l'autre

Bien le bonjour,

dans le cadre de ma campagne de sensibilisation personnelle au cinéma, dirai-je, "d'art", j'ai ingurgité le -pourtant- très recommandé In The Mood For Love, de l'ami Wong Kar-Waï. Oui, celui la même qui règne en ce moment sur l'empire du rafinement et du bon goût, est-il besoin de le rappeler ? (Jeu : The Lesbian Vampire Killers sera-t-il encencé par les Cahiers du Cinéma : oui / non / des questions ?).

Premier constat : comme en témoigne le prix d'interprétation masculine, l'accent a visiblement été mis sur le casting, au détriment du budget musique. Alors oui bon, j'entend déjà des voix s'élever, des gens s'outrer "Oui, je m'outre, comment peut-on, enfin ?! Vous n'êtes pas sérieux ! Appelez la police !". Parce que vous comprenez, dans le milieu, on s'outre hyper facilement. Et la je dis non, désolé : le fond musical du film est complètement foireux.
Alors d'accord, le thème principal peut être considéré comme remarquable, mais répété 473 fois (j'ai compté) dans le film, il devient vite lassant. Voire effrayant, si à force vous devenez comme moi victime de la malédiction du Dédé, qui consiste à voir apparaître André Rieu à chaque fois que les trois fameuses notes de violon retentissent. Et croyez moi, 473 fois, c'est long. J'ai fini en sueur. *schlitch*
Ensuite il y a le sujet du film à proprement parler. (Ne lisez pas si vous ne voulez pas savoir qu'ils meurent à la fin.) Prenons un couple A et un coupe B. Ces deux couples emménagent dans un immeuble dans des appartements voisins. Monsieur A part souvent en voyage d'affaire, ainsi que madame B. Madame A et monsieur B sont donc souvent seuls, et, les robes chinoises de madame A aidant, il commence à éprouver des "sentiments" pour cette dernière. S'en suit une heure trente, ou plus, durant laquelle madame A s'évertue à tourner du cul devant la mine contrariée de monsieur B, qui, ne sachant pas si c'est du lard ou du cochon fait comme s'il n'avait rien vu mais que bon quand même il n'est pas de bois non plus, tu comprends.
Alors oui, bon, il y a l'ambiance chinoise que je n'arriverai pas à retranscrire ici, qui fait que, effectivement, on a l'impression qu'il se passe des choses. Surtout quand madame A va chercher des nouilles et qu'elle croise monsieur B dans la petite ruelle étroite sur la musique d'André Rieu. Ce qui se produit une bonne cinquantaine de fois, car elle aime visiblement beaucoup les nouilles. Bref, un film tout en nuances, en silences, en non-dits, en mains qui se frôlent et en regards biseautés, à travers desquels se dégage une poésie aussi légère que subtile. Un bijou du septième art qui sublime la fragilité de l'être et, surtout, de sa relation à l'autre, diront les connaisseurs (Hein ? Ah non non, il ne "l'attrape" même pas à la fin, comme vous dites...).
Pour ma part, je résumerai mon analyse en une citation de Bénabar, qui m'est venue comme une envie de pisser, aussi, à la fin du film et qui traduit parfaitement mon sentiment à propos de ce chef d'oeuvre :
J'ai besoin d'être seul
Je marche face à l'océan
Pour faire le point
Au contact des éléments
Mais tout ce que j'en conclus
Je dois pas être un poète
C'est que ça doit être chiant
Très chiant dêtre une mouette
(Oui, je voulais citer Nietzsche, mais Morticia ma plante carnivore (faites moi penser à vous parler de Morticia), m'a suggéré quelque chose de plus rassembleur, plus "popu", comme elle dit en claquant des mâchoires. Et il ne faut jamais contredire Morticia. Jamais.)
J'en conclus que je ne pourrai malheureusement pas être jury au festival de Cannes, n'ayant pas la sensibilité requise pour, par exemple, apprécier à sa juste valeur la dimension presque philosophique de cette séquence où monsieur B à l'air d'embrasser un rocher dans un temple, au Cambodge.
Pendant cinq minutes.
Sans aucun dialogue.
...
D'ailleurs, si vous avez compris cette scène, je vous invite à me donner une leçon.

Ce soir, Desperate Housewives s'offira à mes yeux dubitatifs, sur la petite chaîne qui monte. Je compte beaucoup sur cette série pour me remettre de la malencontreuse désillusion d'In The Mood For Love. Regardez : 1, 2, 3, 4... (Pardon. Ceux qui comprennent expliquent aux autres).
Ainsi, demain, je pourrai débattre avec force engouement du caractère brillant, décalé et cynique de cette série avec ce qui me sert de collègues. Ca promet. On va voir ce qu'on va voir !
Tenez, je vous fait les phrases types en avant première : il y aura le "Moi ce que j'adore, c'est que c'est bourré de second degré, hein ?! Hihi !" de l'assistante de direction ou encore le "Moui et puis tu vois il y a cette ambiance malsaine, tu vois, le double jeu des acteurs, un peu à la American Beauty." de l'informaticien de base / critique à ses heures perdues pour Carrefour Savoirs. Sans oublier le "Han et la brune, là, celle avec les ch'veux, elle est trop boOonne !", du commercial.
(Non, ne me dis rien, Léon, je sais que tu as les mêmes à la maison.)
Ce soir, quelques millions de téléspectateurs vont avoir une révélation, et moi aussi.
Enfin, normalement...

Je vous souhaite le bonjour.

mercredi, mai 17, 2006

Pleures, tu pisseras moins

Jean-Philippe
03/2003 - 12/2005

Mesdames, mesdemoiselles, messieurs, c'est non sans une certaine émotion que je me dois de vous annoncer, avec cinq mois de douleur de retard, le décès tragique de Jean-Philippe, yucca et néanmoins ami, survenu dans sa deuxième année.
La maladie, oui monsieur, la maladie, a décidé d'emporter dans les limbes mon vieux compagnon d'infortune, à l'issue de quelques semaines de souffrances atroces, bien entendu (non parce que quand on s'appelle "la maladie", il faut faire les choses comme il se doit). A tel point d'ailleurs, que je n'ose pas vous décrire dans quelles circonstances atroces ce cher petit nous a quitté.
...
Bon d'accord, je vous dis alors : je ne sais pas ce qui s'est passé, il a pourri de l'intérieur.
Si.
Ce qui est dingue, c'est que d'extérieur, on ne se rendait compte de rien. Il avait toujours l'air bien, serein. Et puis soudainement, ses feuilles ont perdu leur vert d'antant pour devenir jaunâtres. Finalement, je me suis résigné à lui en arracher une, pour établir un diagnotic, et parce que j'avais toujours eu secrêtement envie de le faire souffrir (Hein ? Non non, j'ai pas parlé de souffrir, m'enfin, un peu de tenue...) et l'intérieur de son tronc n'était plus rempli de...
(Merde, je ne sais pas ce qu'il y a dans un tronc de yucca quand il n'est pas pourri.)
Bref, il n'était plus rempli de [Insert yucca stuff here], mais d'une substance noirâtre et extrêmement nauséabonde, il faut le reconnaître.
Bon, ne mâchons pas nos mots : Jean-Philippe, sur son lit de mort, puait....
Jean-Philippe, c'était le côté yucca qui sommeille en chacun de nous (si, cherchez bien, non plus à droite, voila...), c'était la piqûre mortelle d'une feuille aussi acérée que tapie dans l'ombre, c'était une touche verdoyante et poussiéreuse dans un monde gris et poussiéreux.
Mais Jean-Philippe, c'était aussi un ami, un confident, une épaule (enfin, non) moëlleuse (non plus) et acceuillante (toujours pas) sur laquelle il faisait bon s'épancher (bah non finalement).
Jean-Philippe, c'était enfin un complice, toujours partant pour commettre les pires forfaits. Souvenons-nous à ce titre du fabuleux kidnapping de fleafou, fomenté par Jean-Philippe et votre serviteur, en d'autre temps, d'autres blogs. Notez d'ailleurs que la victime a depuis hissé le pavillon vert sur son blog, sans doute en signe de deuil, vous savez, le syndrome de Stockholm, tout ça...
Décidément, il ne faisait pas bon être vert en 2005, qu'on soit yucca ou même blog...

Adieu, Jean-Philippe, puisses-tu pourrir dans un terreau plus fertile que celui qui t'a vu naître, et donner à ton tour la vie à une meute de petits yuccas tous plus sadiques les uns que les autres, qui, je l'espère, perpétueront ton oeuvre.

(Si vous désirez laisser un petit mot, un livre de condoléances est à votre disposition au bas de ce post.)

Je dois vous laisser, c'est encore très frais dans ma mémoire, je vais donc me retirer en silence pour aller, seul, chouiner dans mes quartiers (Hein ? Jouer ? Ah non, non, vous n'y pensez pas...).

Je vous souhaite le bonjour.

dimanche, mai 14, 2006

Raisonnable

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais je trouve que les blagues, ou même les simples références à Maïté, ça a vraiment mal vieilli.
Tenez, d'ailleurs ce post sent un peu le moisi, du coup.
Oui, parce qu'avant, quand on voulait parler d'une grosse dame un peu ridicule, ou tout simplement grosse, on parlait de Maïté, tu vois. On disait "Haaan non mais regarde la celle la, on dirait Maïté, huhu.". Alors tout le monde pouffait en coeur. C'était sympa, tu vois, convivial.
Désormais, tout le monde a oublié Maïté, et je ne vous parle même pas de cette brave Micheline.
Dommage. Je pense d'ailleurs qu'on a besoin d'urgence d'une nouvelle grosse, à la télé, parce que sinon comment les gens vont faire...
J'avais besoin de le dire.

Alors sinon parlons en de ce restaurant typique / gite douteux / bouge miteux qui a eu l'honneur de m'accueillir l'autre soir. Non mais dis voir, à la fin, nom d'un chien ! Ca commence par la patronne qui ressemble à une porte de frigo qui n'est pas fichue de me dire si oui ou non c'est possible ou pas.
"On vient ce soir, et on sera tant.", que j'y dis à la mère michel. (Tant étant un chiffre compris entre 4 et 6, bornes exclues, vous avez deux heures)
"Tant ?", qu'elle me dit "Voyons voir."
V'la qu'elle se met à réfléchir en lorgnant sur les quatre chaises qui se battent en duel dans le cagibi qui lui sert de salle de restaurant, alors qu'on n'était pas tant que ça.
"Bon ben oui alors, d'accord pour tant, vers 20h30, ça vous va ?"
"Bah oui."
...
Donc on y va, clopin clopant, et en chemin on rencontre une grosse put... (Ah, on me fait signe en régie qu'en fait non : on y va, point.)
On pose nos manteaux qu'on n'avait pas, et un type vient avec une carte en forme de cochon, si si, nous dire que "bon alors ce soir si vous voulez y'a ça à manger. Point.". Oui, parce que tu comprends, pour se donner l'air d'un gite sympa et convivial, rien de tel que de faire un menu unique, comme ça tout le monde mange la même chose, personne ne veut vous piquer vos frites et ça il faut reconnaitre que c'est tout de même fort appréciable. Et puis bon, faut avouer que c'est beaucoup moins chiant pour la cuisinière, hein. Non mais bon ben quoi à la fin, qu'est ce que ça veut dire ces restaurants qui nous donnent le choix ? Hein ? Ils seront bien contents quand tous les cuisiniers seront morts d'épuisement, voire même d'épuisement.
Alors bon, vu que tout le monde avait choisi le même menu, du coup, j'ai pris la même chose que tout le monde, et le type au cochon, là, il avait l'air rassuré.
Ca a commencé par une soupe aussi verte qu'elle en avait l'air, avec des feuilles de machin dedans. La dame avec sa tête de frigo nous a posé la soupière sur la table, et pis elle est partie, genre "démerdez-vous". Moi, ne pas nous servir la soupe, j'ai trouvé ça louche. Mais bon les autres disaient que "Ahah c'est sympa et convivial".
Bon.
Personnellement je n'ai jamais ressenti un quelconque plaisir à servir une assiette de soupe, hein, mais après tout chacun son truc.
La soupe était bonne, merci. Malgré tout je n'arrivais pas à m'enlever de la tête que la soupe c'est avant tout de l'eau chaude aromatisée destinée à couper la faim, mais c'est sans doute parce que moi, monsieur, je sais ce que c'est que la faim ! C'est pas comme tous ces petits cons qui passent leurs journées à train... (Ah, on me fait signe en régie qu'en fait non : je ne sais pas vraiment ce que c'est que la faim.)
S'en est suivi une assiette de risotto "végétarien" accompagné d'une salade aussi verte qu'elle en avait l'air. Moi je me disais, dans mon fort boyard intérieur, que "végétarien" c'était un moyen un peu passe-partout de nous dire qu'on n'aurait pas de viande parce que ça coûte cher et que du coup on fait moins de bénéfice par pigeo... client. Mais les autres trouvaient toujours ça aussi sympa et convivial, et aussi super original.
Si.
Du riz et de la salade.
Original.
...
Et puis la dame frigo est venue nous annoncer les desserts. J'ai été choqué, par qu'il y avait le choix, là. J'ai failli lui demander si elle n'était pas trop fatiguée, du coup, comme elle avait fait plusieurs desserts, si elle voulait pas s'asseoir cinq minutes pour récupérer, tout ça, boire un verre d'eau. Mais en fait non, je n'ai pas voulu risquer d'assombrir une ambiance aussi sympa. Et conviviale.
C'est le monsieur cochon qui est venu m'apporter ma tarte.
Enfin...
Techniquement, c'était effectivement une tarte. A part que moi généralement, je préfère quand la pâte est cuite, mais bon, je vous vois venir, vous allez encore me dire que je cherche la petite bête. Et vous auriez raison, puisque tout le monde s'est régalé à grands renforts de "mmmmhh" et autres petits cris stridents que, pour des raisons techniques, je ne peux malheureusement pas reproduire ici.
Bon, finalement l'assemblée a trouvé ce repas extrêmement sympa et convivial, d'autant plus qu'il n'aura coûté que quinze euros par convive, avec les deux cafés et le ridiculement petit pichet de rosé compris. "Raisonnable.", comme on dit, en prenant une tête de monsieur sérieux qui connait les prix, et qui joue en bourse.
Ca doit venir de moi, mais quinze euros pour une assiette de flotte, un bolino salade et une part de tarte de chez Tricatel, ça m'est resté un tout petit peu sur l'estomac. Comme quoi, ça ne sert à rien de s'empifrer...

Je vous souhaite le bonjour.