jeudi, juin 08, 2006

La malédiction de 8h53

Me rendant au travail de bon matin, pour gagner mon pain quotidien, j'ai croisé un type sur les travelators.
Oh et puis non tiens, je vais plutôt le faire en vers.

"Me rendant au travail comme chaque matin,
Afin de récolter le fruit de mes efforts,
Arpentant, volontaire, mon bonhomme de chemin,
J'ai croisé un brave type sur les travelators."


Oui, non, il faut dire travelator. Pas escalator. Parce que c'est pas la même chose, quoi. Le travelator est au tapis roulant ce que l'escalator est à l'escalier, en fait, hein. Bon. Alors mon type, là, enfin, le type, parce qu'ensuite vous allez encore interprêter mes propos et vous voyez ce que je veux dire, le type était sur son travelator, et il travelait without moving.
Bah oui.
Comme beaucoup de monde sur les travelators, le type il était comme figé, se cramponnant plus ou moins à la rembarde, il attendait que ça se passe, tranquille, mais un peu stressé de l'arrivée quand même. Oui, bon, c'est normal, on est toujours un peu stressé lorsqu'on part en voyage, surtout lorsqu'au bout de la route nous attend une sorte de broyeuse mécanique mais un peu fourbe aussi, qui guette le moindre lacet mal fait pour vous happer la jambe et dévorer vos enfants si vous en avez, ce que je ne vous souhaite évidemment pas (des deux interprétations que peut avoir cette phrase, je sous-entend l'autre).
Mais bon, le type, je lui aurais demandé pourquoi il ne marchait pas sur le travelator (mais noonn... C'est pas le travelator qui ne marchait pas, vous êtes fatigants...), il m'aurait répondu "tsssseuuhh, pourquoi est-ce que je vais m'esquinter à marcher alors que le travelator fait tout le boulot pour moi, heuuu ?!". Quel con. Alors qu'il était déjà en sueur. Et puis il aurait aussi pris ce petit air hautain du faux-cul qui n'ose pas avouer qu'il a peur. Alors que bon, c'est pas parce que ça marche tout seul qu'il ne faut pas marcher, merde, enfin... Il suffit de faire un petit saut élégant à la fin pour éviter la gueule béante du monstre d'acier, et le tour est joué, ça n'est pas en restant immobile pour retarder l'échéance que les choses vont se résoudre d'elles même, mais bon ça à priori personne ne l'a compris. Pan, une révélation fracassante de plus à l'actif de ce blog. Ils veulent me faire taire, je vous dis, mais mon combat pour la vérité est imperméable aux intimidations.
Et j'ai un flingue.

Bon, mais le problème n'était pas tant le travelator, ou même le fait de rester immobile dessus, que l'accoutrement du bougre. D'accord, c'est une règle, on a dit pas les fringues, mais permettez moi un écart.
Le type était là, avec sa tronche de Michel, et d'ailleurs il aurait très bien pu s'appeler Claude. Il avait mis du poivre et du sel dans sa barbe, et aussi dans ce qui lui restait de cheveux. De tête, comme ça, il avait l'air brave, Michel, "bien dégagé derrière les oreilles, s'il vous plaît, parce que les chaleurs arrivent, z'avez vu ?! Ils l'ont dit hier au poste, hinhin.". En fait, j'ai tout de suite remarqué le problème principal de Michel : sa femme. Non, elle n'était pas là, mais à en juger par l'attirail vestimentaire du Glaude, j'ai tout de suite compris le vil dessein que la mère Michel réservait à son mari : lui pourrir la vie avec ses goûts de chiotte, et le rendre ridicule aux yeux du monde afin de le punir de ne pas avoir donné à sa femme la vie dont elle rêvait, parce qu'elle voulait un domaine où l'amour serait roi et où elle serait reine, Claude.
Le type était donc affublé d'une chemise rose saumon d'écosse (10€ au marché), sur laquelle dégoulinait une cravatte trop bleue pour être marine (cadeau de noël). Le tout était mal empaqueté dans une veste mi-saison oscillant entre le vert et le bleu clair, mais qui n'avait visiblement pas encore choisi son camp (récupérée chez le frangin de Madame Claude). Au rez-de-chaussée de cette abomination textile survivait un jean à pinces que je pensais disparu depuis 1987 (40€ les 5 en dégriffé), qui s'affalait d'une façon surréaliste sur deux mocassins noirs au bord de la crise de nerf (25€ d'occasion).
Là, baignant dans la moiteur matinale, ployant sous le poids de son attaché case cuir, une goûte de sueur perlant à sa tempe, effrayé qu'il était par le travelator maudit qui l'emmenait, c'est sûr, vers une journée de merde certaine, Michel me regarda fixement pendant 1,7 seconde. A cet instant, j'ai pu lire dans le marron pur de ses yeux toute la détresse d'un homme instrumentalisé par une femme-succube acquise à la cause de Satan en personne. A côté de cette vision terrifiante, l'idée d'un troupeau de chats noirs fonçant sur moi toutes griffes dehors m'aurait paru réconfortante. Pardon, Michel (ou Claude je ne sais plus). J'ai entendu ton appel au secours, mais la crainte du démon m'a rendue muet.
Monsieur le président, je demande qu'on stérilise cette femme au plus vite. N'attendons pas un autre Claude (ou Michel, je ne sais plus) pour mettre un terme à ces horreurs.

Je vous souhaite le bonjour.

2 Comments:

  • Moi je dis qu'au contraire, sa femme est partie en vacances à Trouville et que ce brave Michel-Claude doit dorénavant se démerder seul, d'où cet accoutrement et son air pas frais dû au repas dégueu qu'il s'était préparé la veille.
    Je sais que tu essaies de te rassurer mais sans nous hein, vous êtes foutus. Ils le disent dans Desperate Housewives, alors c'est que c'est vrai.

    By Anonymous Anonyme, at juin 08, 2006 1:48 PM  

  • Desperate Housewives ? Tu veux dire la série sponsorisée par Le Chat Machine ?
    Ah ouais, ouais...
    (Bon, sinon, tu penses sincèrement qu'on peut "partir en vacances à Trouville" ? Hein ? Sans dec ?)

    By Blogger Jean-Pierre Jean, at juin 12, 2006 11:21 AM  

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